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Habiba

Give up the fight ! La fin de la 4D !

Je me souviens de quelqu’un qui m’avait fièrement montré son tout premier tatouage, heureux d’arborer ce message si puissant, qui allait, ma foi, de pair, avec ses choix vestimentaire et capillaire, quoique sa carnation l’éloignât un peu de celle de l’auteur de la phrase qu’il avait décidé d’encrer pour toujours dans la chair flasque de son bras droit : « Don’t give up the fight ».


Je ne connais pas Bob Marley, je n’apprécie que très peu de ses productions musicales (voire aucune je pense), même si pourtant j’aime beaucoup écouter certains morceaux de reggae…


Très (vraiment très) méfiante face à tout ce qui m’entoure et donc m’influence, que j’en sois consciente ou non, je vis majoritairement dans le silence, et n’écoute que très rarement de la musique et, lorsque c’est le cas, uniquement des morceaux bien choisis, en conscience et en accord avec mon état d’esprit, les sensations et les sentiments que j’aimerais connaître et vivre, en rejetant, naturellement tout ce qui pourrait me mettre mal à l’aise (sauf si c’est ce que je recherche !). C’est d’ailleurs pour cela que jamais, vraiment jamais jusqu’à présent en tout cas, personne ne peut me proposer plus d’un ou deux morceaux avec lesquels je sois en accord, lorsqu’il s’agit de partager l’écoute musicale (je rends ici hommage à la programmation de la radio FIP, ainsi que celle de TSF Jazz, qui, mise à part la publicité intempestive pour la seconde, sont les seules stations de radio que je connaisse, capables de me garder à l’écoute de leur antenne plus de cinq minutes). Il y a très peu de musiques que je puisse écouter librement avec plaisir, bien souvent, surtout en matière de variétés, de chansons modernes, contemporaines, je ressens un mal-être, lié aux ondes et aux messages ainsi véhiculés.


La musique, et l’industrie du divertissement en général, sont des outils de propagande. Cette dernière pour moi aujourd’hui, n’est ni bonne ni mauvaise, car pendant que certains considèrent que les messages publicitaires, que martèlent les médias, visant à protéger ceux qui les reçoivent, d’un mal invisible, sont une propagande autoritaire à l’œuvre et qu’il faut les combattre, d’autres en même temps considèrent et admirent cette campagne de sensibilisation, grâce à laquelle tout le monde peut s’en sortir !

Entre campagne de sensibilisation et propagande, il n’y a que la valeur méliorative ou péjorative que « chaque Un » y accole, et ce, de manière subjective, à la lueur de ce qu’on accepte de voir. Cependant ni l’une ni l’autre de ces expressions n’est positive ou négative, elles sont neutres, factuelles et finalement synonymes.

Ce qui peut nous inciter à considérer ou rejeter l’une ou l’autre, c’est l’ensemble de notre fiction, de notre réalité, et l’on accordera de l’importance à cela d’une manière ou d’une autre en fonction de ce qu’on ressent et entend comme message non explicite derrière quelque chose de neutre à la base.

Ensuite, on choisit généralement son camp : le pour ou le contre, voire le fameux « ne se prononce pas » ! Tout dépend donc du prisme à travers lequel on décide d’observer un phénomène.


Ayant une bonne partie de ma vie choisi la neutralité subtile, le refus de prendre position (et cela est déjà une prise de décision en fait !), on (et surtout moi) m’a longtemps reproché de jouer sur les codes, de tromper, d’être une anguille politique notamment, hé bien, je pense que je peux dire aujourd’hui que je n’en avais, concrètement, que faire… Pour moi les élections, c’était un peu comme le football, je connais les règles (et encore je ne sais même pas exactement ce que c’est qu’une zone de réparation, n’en comprenant vraiment pas le sens), mais je ne m’y intéresse pas…


Me retrouvant étudiante à Sciences Po Paris lors de l’élection présidentielle française de 2012, il était difficile - alors qu’aujourd’hui certains camarades de promotion siègent au gouverne-ment, à la gestion de la société République française - de ne pas être au courant de la grande compétition électorale qui se tenait, non pas dans le pays, non pas dans les esprits, mais bien dans les médias, les corps, et dans les conversations dites sérieuses ! Ayant à ce moment-là des fréquentations complètement atypiques et clairement affichées comme étant de bords politiques assumés, je socialisais avec tout ce monde et découvrais qu’il était possible d’être politiquement opposé à quelqu’un tout en ayant des intérêts communs (je pense notamment à ces couples éphémères ou non, constitués parfois de deux représentants de partis farouchement opposés dans l’arène politicienne).

Il est aisé d’imaginer de mon point de vue alors combien cette question du positionnement avait encore moins de valeur ni de pertinence.


Je n’arrivais pas et n’arrive d’ailleurs toujours pas à comprendre comment on peut se jeter des noms d’oiseaux (qui n’ont rien demandé) sur la scène politique, pour ensuite se dire des mots doux (ou crus bien souvent), sur l’oreiller, une fois la nuit tombée…

Aujourd’hui la seule explication qui m’éclaire face à ce paradoxe et à tant d’autres, c’est le concept de theatrum mundi. Je pense que j’y consentais volontiers, plus ou moins consciemment à l’époque, puisque moi-même alors fortement matricée, je jouais également un rôle, je ne sais pas encore exactement lequel et ma foi, ne pense pas avoir grand intérêt à le trouver et le comprendre, je pense que j’étais simplement dans le rôle de la fille qui veut survivre et qui ne pense même pas encore à exister


En effet, jamais la politique, ou le football, ou quelque sujet que ce soit, à cette époque-là, et ce jusqu’à récemment, finalement n’a été pour moi l’objet d’un combat. Je pense que pour consacrer sa vie à n’importe quel concept extérieur à soi, il faut en avoir le loisir. Le temps, les moyens matériels et la disponibilité mentale sont indispensables pour revêtir un costume, un masque, emprunter des attitudes travaillées et un langage rhétorique écœurant tant il sonne faux ! Ce loisir, à l’époque, j’étais bien loin de pouvoir y accéder, j’en remercie la vie. Et pour cause, j’étais bien trop occupée avec moi-même, à survivre. Quelle protection !


Pour en revenir à cette personne tatouée dont je parle en introduction, je considère que militer, combattre, s’engager, où que ce soit, dès que c’est à l’extérieur de soi est vain. Encrer dans son épiderme une phrase devenue si courante que « don’t give up the fight » est le symbole d’un décentrage de soi (il n’existe aucun sauveur extérieur). L’illusion que la solution est à l’extérieur de soi, que la résolution d’un problème se fera nécessairement par le combat, les deux combinés, hé bien, mes chers lecteurs, cela donne tout simplement la guerre ! Or, j’aspire, plus que tout à la Paix et j’imagine (dans ma naïveté) que toute l’humanité aussi. Sauf que bon nombre de messages, de dictons, de citations, de paroles motivantes et de comportements sociologiques acquis (la compétition notamment), sont dans le registre belliqueux. On me rétorquera certainement la locution suivante : « Si vis pacem, para bellum ». Cependant préparer la guerre n’a rien à voir avec le confit effectif, nuance ! La linguistique nous révèle encore de lourds secrets.


Je reste persuadée que si on accordait aux mots, à tous les outils de communication, notamment langagière, leur sens véritable et premier, il y aurait bien moins d’incompréhension et donc moins de conflits. Lorsque j’ai compris que le projet était justement qu’il y ait un maximum d’incompréhension et de conflits, j’ai commencé à questionner l’utilité et la raison d’être d’instances étatiques, régulatrices de la langue, comme l’Académie française ! Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’en ai étudié l’histoire, les rôles et l’impact dans la société… Mais de cela il sera question certainement dans un autre billet spécifique (ou pas !). Cette prise de conscience du véritable projet derrière les mots, elle est également bien visible à travers d’autres et même tous les organes régulateurs étatiques, en première ligne desquels l’Education nationale ! Véritable usine à citoyens, donc à ex-humains, car devenus esclaves.


La langue française telle qu’elle est codifiée ne satisfait pas mes intentions de communication, or, vouloir changer la langue est vain, créer mon propre langage est une idée ingénieuse, et somme toute déjà réalisée, mais pourquoi m’évertuer à communiquer dans un langage que nul autre humain que moi ne peut comprendre ?

J’ai beau avoir compris, dit, transmis même, que le langage matériel est nécessairement (naturellement) limité, qu’il est bien souvent un outil au service d’un projet hiérarchique et que, notamment la langue française, faisant la part belle au masculin qui n’aura de cesse de l’emporter sur le féminin, il ne faudrait point s’étonner de la supériorité implicite, et bien souvent inconsciente du masculin sur le féminin, dans toute situation de communication ayant comme seul fondement la langue française ainsi orchestrée. Même si cela était compris, je croyais sincèrement à une possibilité de trouver le moyen de détourner ces injonctions hiérarchiques implicites, que l’égalité était possible, etc.


Loin, bien bien loin d’être féministe, jamais je n’ai cherché à féminiser plus que de coutume ce qui ne l’était pas à l’origine et, ai ressenti pas mal de perturbations (certainement par déformation professionnelle, lorsque j’étais enseignante de lettres modernes) face à des récits outrageusement féminisés (je ne donnerai pas d’exemple ici).

Je reconnais avoir cru un temps à l’écriture inclusive, certes, en tout cas sur le principe, notamment lorsqu’il s’agissait de laisser la possibilité d’accorder au féminin ou masculin, et aussi parce que c’était bien plus rapide que de réécrire totalement le mot pour lui accoler sa marque féminine… Jamais pourtant je n’ai été dans la systématisation et étais bien loin de me douter du gigantesque projet progressiste à l’œuvre derrière ces fantaisies stylistiques !


Tout cela pour dire qu’aujourd’hui j’abandonne, oui, j’abandonne le combat. Même si jamais je n’aurais eu l’idée de me tatouer de ne jamais le cesser, même si je ne l’ai jamais vraiment débuté, je l’arrête. Je me rends ô langue française, codifiée et inégalitaire, je me rends et me soumets à tes codes avec lesquels je tombe d’accord, dès qu’il s’agit de vouloir transmettre à mes congénères francophones (en l’occurrence), ma pensée. Toutefois, non, je ne fais pas allégeance à l’Académie française, jamais une institution ne pourra faire plier un individu souverain, car elle ne peut avoir de poids que sur la masse. Je fuis et abhorre le collectif sans âme, je crois à une conscience collective transcendante, mais elle n’est pas exclusivement humaine. Ainsi tout ce qui concerne l’humanité, ou une partie, excluant le reste du vivant, n’a pour moi, aucun autre intérêt que son avilissement. La langue française, dont j’étudie chaque jour les méandres, me fascine, et elle n’est pas la propriété de la France. Bon nombre d’autres peuples, d’autres territoires connaissent et utilisent pour communiquer cette langue, il est d’ailleurs intéressant à ce propos de se reporter, notamment à l’usage bien plus précis et juste de cette langue dans des territoires bien éloignés de l’Hexagone (Québec, etc.)


Tant qu’il y aura des injonctions à combattre quelque chose, tant que des meneurs inciteront la masse à se lever pour ses droits et à ne pas cesser le combat pour cela, il y aura des manifestations, il y aura des conflits, des guerres, et ainsi la Paix ne fera que reculer sans cesse. On peut refuser l’esclavagisme, on peut refuser l’avilissement, la domination par l’action ou la non-action pacifiques. Je me refuse à dire non-violente, car cela peut exclure malgré tout la Paix qui est évidemment, sur mon Chemin, aujourd’hui, ce à quoi j’aspire le plus et chaque jour me guide.

Pour filer la métaphore initiale, dont vous avez certainement la référence, je dirais plutôt « Lève-toi, […], et marche » Évangile, Jean 5:8.


J’ai longtemps cru que c’était dans la douleur que je me réaliserais, que par la résistance et le combat, je triompherais. Aujourd’hui il n’en est rien, j’aspire à la Paix, à l’Ataraxie et au calme permanent. Cependant, la douleur, le conflit et la lutte sont nécessairement présents dans cette dimension et je les suppose (certainement à tort, mon cheminement à ce propos est toujours en cours), associés à l’incarnation, ou tout du moins au matérialisme de celle-ci.


Que la Paix soit sur vous,


حبيبة

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